mercredi 4 mars 2015

Questions de refus, refus de la question

  "N'est-il pas le fils du charpentier? Sa mère ne s'appelle-t-elle pas Marie, et ses frères, Jacques, Joseph, Simon et Jude?" (Ev. selon St Matthieu, 13)

 Les personnages des Évangiles réfractaires au message de Jésus se questionnent sous prétexte que, c'est certain, Il est né quelque part. Tout ceci est ridicule, on connait son père, qui est charpentier, sa mère. On sait bien où il est né. A Nazareth. (Nazareth! Peut-il sortir de là quelque chose de bon?). Comment pourrait-il être le Messie, puisque nous savons qui il est socialement? 
  
Certains sceptiques (peut-être pas ceux qui se sont le plus renseignés) justifient aujourd'hui de douter pour des motifs inverses. Du Jésus, historique, que sait-on? Inversion de la question, éternité du doute à la racine. (En fait, les historiens s'accordent sur l'historicité de Jésus. On a moins de preuves de l'existence de bien des anciens!).

Un voisin nous a posé des questions sur notre foi. Il a confronté des pratiques telles que la confession à une critique historique. Je conçois bien ce qu'il a dit. Il y a une rationalité politique de l'institution religieuse, pour ne pas dire une instrumentalisation dans les rapports sociaux de pouvoir. 
La tentation de l'orgueil de raisonner, de faire montre d'un esprit avisé, ouvre un large chemin dans cette perspective. 
Je n'ai pour alternative que la simplicité du détour par la foi. Je crois que Jésus Christ est mort pour notre salut, qu'il nous a sauvés. Voilà tout. Les usages sociaux et politiques de la religion sont situés dans l'homme comme animal social, complexe et pensant. L'espace pratique de la religion, c'est ici bas. Son vrai?... est ailleurs. Jésus Christ n'a cessé de nous le dire. C'est un propre totalement extérieur, dont les usages par les gens ordinaires peuvent donner lieu, d'ailleurs, à des tactiques fluides contre les pouvoirs dominants: Michel de Certeau a écrit de jolies pages là-dessus dans Arts de Faire.

On rencontre des chrétiens qui se rétractent devant certaines questions et même devant la perspective d'une recherche interrogative, interprétée comme comme fermeture, refus, intention d'attaque peut-être. Nous parlions à une nouvelle connaissance d'un petit groupe de questionnement que nous avons mis en place. Pour quoi faire, dit-elle? En quoi est-ce que cela nourrit votre foi? Le ton de cette dame était suspicieux. Ses pupilles immobiles fixaient les miennes. Malaise.

Les bases sur lesquelles reposent la foi sont si fragiles déjà, si essentielles et si faibles...En fait, celui qui interroge est intrigué. Il résiste à se laisser capter, mais il est concerné, pour ne pas dire appelé. ll ne m'intéresserait pas d'adresser des questions critiques à des scientologues sur leurs croyances, du moins pas dans une perspective spirituelle. Ce qu'ils disent n'existe pas. 
Je me souviens de ce jeune séminariste avec qui il a été parfois difficile d'échanger. Les questionnements qu'on lui proposait rencontraient souvent la réponse qu'il s'agissait d'un blasphème, d'une hérésie. Au contraire, l'ami. Il faut se laisser secouer par les questions des autres, en confiance avec notre pauvreté.

Jésus était infiniment patient devant les questions des apôtres. Exaspéré souvent, désolé du manque de foi et de perspective. Mais aussi, il y mettait une dose d'humour plein de malice: - Où habites tu? - Venez, et vous verrez (voir Jean, I). Sa tendresse accueille un comique de situation tragique, lorsque les disciples ne peuvent pas encore comprendre. Qu'a-t-il voulu dire? répètent-ils lorsqu'Il annonce Sa passion. Mais a-t-il déjà mangé? s'inquiètent-ils alors qu'Il parle de tout autre chose. De nombreuses paroles sont prises au sens propre, les apôtres sont présentés comme de grands naïfs, et cela fait sourire parfois. Nous ne sommes pas mieux qu'eux. Accueillons tout humblement, la foi et la curiosité, la pénétration et le mystère. 

Que Jésus nous permette d'entrer dans le dialogue avec nos frères, de maintenir notre droiture dans l'ouverture au questionnement. Jeu d'équilibre où ne tiendrons pas debout par nous-mêmes, mais par Sa grâce.









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